Chers lecteurs,

Au moment où vous lirez ces lignes, Christian Hohmann aura quitté le secrétariat international de Church & Peace comme il vous l‘annonçait dans le dernier numéro de cette lettre de nouvelles, et j‘aurai pris la relève à son bureau ... Nous sommes reconnaissants à Christian pour son engagement pendant quatre ans au sein de notre association. Durant ces quatre années, notre collaboration a été fructueuse dans bien des domaines. L‘efficacité de son travail en équipe avec Terri Miller, Birgit Dobrinski et Blaise Amstutz n’aura pas échappé à ceux qui ont participé à la rencontre du Bienenberg en 1999, par exemple. En tant que présidente, j’ai particulièrement apprécié d‘avoir en lui un équipier sérieux dans son engagement et cordial dans ses relations, même au coeur des conflits .... Nous lui souhaitons la bénédiction de Dieu pour le travail qui l‘attend dans le district protestant de Koblenz et nous espérons garder le contact avec lui dans les années qui viennent...

Une nouvelle équipe doit se constituer, avec comme toujours le défi de résoudre ce qui est et reste une sorte de “quadrature du cercle” : assurer un travail de qualité avec des moyens toujours trop modestes.... Dans un premier temps le remplacement de Christian n’a pas fait l’objet d’une large publicité, mais j’ai répondu oui à la proposition qui émanait de certains membres du réseau d’assurer à mi-temps les fonctions de secrétaire générale au moins pour une période d’interim. La présidence du Conseil d’Administration devra donc être confiée à un autre membre du groupe élu lors de la dernière Assemblée Générale...

Voyant l’évolution des choses au secrétariat international depuis cette dernière Assemblée, il me semble que certaines phrases prononcées lors des débats de cette rencontre sont en train de se concrétiser : Church & Peace doit s’accorder une phase de “repos de la Terre” - non pas dans le sens d’une cessation de ses activités mais dans le sens d’une écoute très attentive de ce que l’Esprit veut nous dire dans notre pauvreté, des accents qu’Il veut voir donner à notre travail dans l’avenir. La Lettre de Nouvelles que vous avez entre vos mains contient plusieurs impulsions venant de régions du monde hors de l’Europe qui devraient être un énorme encouragement pour nous à ce moment crucial de notre existence : Il y a par exemple l’appel à proclamer toutes les Eglises “Eglises de Paix” qui nous vient de l’organisation-sœur “New Call to Peacemaking”; il y a la réflexion des frères et sœurs mennonites colombiens sur l’engagement des Eglises auprès des personnes victimes de la guerre et sur les “sanctuaires de paix” - qui rappellent très fort notre vision et notre expérience de la communauté engagée à la suite du Prince de Paix; il y a le récit de l’éveil des Eglises quakers et mennonites de la région des Grands Lacs en Afrique à leur responsabilité d’artisans de Paix dans un contexte particulièrement délicat . Les frères et sœurs colombiens et africains dont il est question dans ces articles travaillent dans des conditions matérielles bien plus précaires que les nôtres, mais ils misent sur la richesse du Royaume et la richesse de la vie de l’Eglise lorsque celle-ci se met résolument en marche à la suite de Jésus - Christ.

Pour ma part, j‘aimerais prendre au sérieux ces différents appels et témoignages : miser sur la richesse du message dont nous sommes porteurs sans gémir sur la pauvreté de nos moyens... Et j‘avoue que mon souhait pour chaque lecteur et lectrice est qu’il et elle se laisse contaminer par l’esprit de ces appels et de ces témoignages.

Bonne lecture!

Marie-Noëlle von der Recke

P.S. Nous nous réjouissons de voir ou revoir certains d'entre vous lors de nos prochaines rencontres régionales !

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Encore en vie !

Les Eglises de Paix africaines de la Région des Grands Lacs formulent leur engagement pour la Paix.

par Bridget Butt

“Encore en vie!" Voici le message d'un pasteur quaker congolais à l'occasion d'une consultation d'Eglises mennonites et quakers du Rwanda, du Burundi et de la République Démocratique du Congo (RDC) en août 1999. Cette rencontre, qui a eu lieu dans un contexte de la guerre civile et du génocide que connaît cette région, a rassemblé les Eglises historiquement pacifistes des Grands Lacs, ces Eglises protestantes qui se réclament d'une histoire et d'une théologie de la non-violence.

La rencontre s'est déroulée à Bujumbura au Burundi. Le Burundi avec le Rwanda et la RDC font partie de ce qu'on appelle la Région des Grands Lacs d'Afrique. Dans cette région, sous couvert de lutte ethnique et de guerre civile, la violence a coûté près de 1 500 000 vies humaines pendant la dernière décennie. Et pourtant le pasteur Mkoko Boseka aimerait que les chrétiens du monde entier sachent "qu’ils sont encore en vie". Actes 20:7-12 raconte l'histoire d'un jeune homme, Eutychus, qui a été gagné par le sommeil en écoutant un long sermon, et qui est tombé d'une fenêtre située au troisième étage. Tous ceux qui étaient présents le croyaient mort, mais Paul de Tarse prit Eutychus dans ses bras et dit:"Ne soyez pas inquiets. Il est encore en vie." Pour le pasteur Mkoko et tous les autres responsables des Eglises de Paix présents lors de la rencontre du mois d'août 1999, l'histoire d'Eutychus est plus qu'une oeuvre littéraire parmi d'autres; c'est l'histoire vraie de leur propre expérience quotidienne de la violence, et de la vie qui continue, même défigurée par la mort.

Les projets missionnaires qui ont abouti à l'implantation des Eglises de Paix au Rwanda, Burundi et dans la RDC ont interprété la tradition non-violente de ces Eglises de façon implicite; par conséquent on insistait peu sur les positions traditionnelles telles que l'objection de conscience, le refus de payer les impôts servant à la guerre ou le refus de porter les armes. Face au fléau de la violence apparu ces derniers temps, ces Eglises, sous direction africaine, choisissent maintenant de se réapproprier cet héritage non-violent qui les rattache à travers les siècles aux frères et soeurs quakers et mennonites du monde entier.

En réponse à la mise en place d'un programme de service civil obligatoire au Burundi comprenant un entraînement militaire, à l’obligation de participer à des gardes de nuit armées dans les villes au Rwanda, et à un appel national en RDC à défendre le pays contre les envahisseurs étrangers, une demande a été faite pour que se tienne un forum qui permette la réflexion et la consultation sur ce que signifie être une Eglise de Paix dans ce contexte.

Ce forum a eu lieu du 17 au 21 août 1999 en présence de 13 responsables mennonites et quaker du Rwanda, Burundi et de la RDC. Parmi les invités, il y avait des mennonites et des quakers de Colombie et du Guatemala, des représentants des organisations de service Quaker et Mennonite et des membres de African Great Lakes Initiative, une équipe de paix Quaker.

Les participants à cette rencontre ont été particulièrement impressionnés par la présence des trois invités d'Amérique Latine: Edgar Madrid, un quaker du Guatemala, Peter Stucky et Ricardo Esquivia représentant l'Eglise mennonite en Colombie. R. Esquivia, juriste spécialiste des droits de l'homme et P. Stucky, pasteur, sont les fondateurs du Centre Justapaz à Bogota (Colombie). Ils ont décrit leur lutte, qui a commencé il y a dix ans, pour obtenir l'exemption du service militaire pour les objecteurs de conscience et leur combat -au niveau de la législation- pour empêcher la fermeture du Séminaire Mennonite à Bogota par le gouvernement colombien.

D'après Ricardo Esquivia et Peter Stucky, le Royaume de Dieu qui est paix et justice, propose de nouvelles formes et un nouveau modèle pour un monde en recherche. L'expérience colombienne démontre que par la solidarité locale et internationale, Dieu peut utiliser un groupe très petit pour faire une différence. Cela demande cependant de très gros sacrifices personnels sur une longue période pour arriver à une transformation réelle et à long terme. R. Esquivia et Peter Stucky ont encouragé les participants africains en faisant remarquer que lorsqu'un petit groupe de croyants agit avec conviction et démontre "qu'il y a de la vie", le soutien ne saurait faire défaut.

Les participants de Colombie et d'Afrique ont remarqué avec surprise que malgré les dimensions ethniques des conflits dans la Région des Grands Lacs, une analyse socio-économique et socio-politique fait apparaître une plus grande similitude entre les types de conflits qu'ils ne l'avaient pensé de prime abord.

Contrairement aux mennonites colombiens, les Eglises de Paix africaines n'ont pas choisi de s'impliquer sur le plan politique. Leur engagement pour la paix se traduisait par la prédication, les actes de compassion et de pardon, et une vie sanctifiée. La question a été posée de savoir si les Eglises devaient s'impliquer davantage dans la politique. Selon Ricardo Esquivia, il est impossible de vivre sans être engagé politiquement. Jésus lui-même a montré que la prise de position publique est une réponse appropriée au péché et au mal. Ricardo a rappelé que la politique n'est rien d'autre que "l’art magnifique de transformer les rêves en réalités".

Harold Miller, du MCC (Mennonite Central Committee) a rappelé aux participants que la position des mennonites par rapport à la paix était à l'origine un principe interne qui définit la communauté, et non une sorte de forum d'opposition à la guerre à l'extérieur de la communauté. Que signifie cette référence à une position pacifiste historique dans le contexte des sociétés africaines déchirées par la guerre ? Des missionnaires occidentaux ont apporté l'Evangile du Christ et la doctrine de l'Eglise en Afrique. Mais l'Afrique a reçu l'Evangile avec des yeux et des oreilles africaines, et elle se trouve aujourd'hui à un point crucial de son histoire: sa population commence à interpréter d'une façon nouvelle et radicale ce qu'elle a entendu. Comme l'illustre l'histoire d'Eutychus, le mode religieux africain de voir le monde a, par exemple, toujours accordé une importance plus grande à ce qui donne la vie. La théologie des deux royaumes de la Réforme occidentale, qui sépare le royaume politique du règne spirituel, n'a jamais été populaire en Afrique. Une vue africaine du monde voit Dieu heureux de réconcilier toutes choses avec lui-même sur terre et au ciel (Col.1:20). Les Eglises de Paix africaines cherchent à résister à la guerre en agissant pour la vie dans tous ses aspects.

Touchés par ces réflexions, les participants ont passé la dernière journée de la consultation à rédiger une déclaration de leur engagement pour l'objection de conscience au service militaire et à la guerre. Ils ont aussi affirmé leur engagement pour la paix et pour la promotion d'une culture de paix et de non-violence dans la Région des Grands Lacs d'Afrique. En pratique, cela signifiera la création d'un groupe d'objecteurs de conscience, l'engagement de continuer à travailler au développement de programmes pour la paix dans les écoles et l'éducation à la paix. Une structure consultative permanente a été crée et porte le nom de “Conseil Consultatif pour la Paix dans les Grands Lacs” (CCPGL). Il y a eu une deuxième consultation à Nairobi (Kenya) en mars 2000 (document en cours de rédaction).

“Encore en vie!". Dans cette nouvelle période d’échange avec l'Eglise africaine, il est stimulant de se demander comment l' Eglise de Paix africaine va contextualiser le pacifisme et la non-violence au 21è siècle...

Pour une copie de la “Déclaration des Eglises Historiquement Pacifistes de la Région des Grands Lacs d'Afrique”, et d’autres documents, en anglais ou en français, adressez-vous à Bridget Butt <<[email protected]>>.

Extraits d'un article paru dans Peace News, mars-mai 2000 (abonnement en Angleterre: £10 par an, hors Angleterre: £15 par an)

Avec autorisation de l'auteur. Trad: Louise Nussbaumer

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Les sanctuaires de Paix

Un projet des mennonites colombiens

par Jenny Neme et Pablo Stucky

Dans une situation politique difficile, les responsables d’église de Colombie ont décidé de s’impliquer. Ils font une proposition qui est directement en lien avec la situation que connait leur pays... Cependant, est-ce que nous ne pourrions pas, nous aussi réfléchir à la façon dont nos Eglises pourraient davantage être des signes pour notre temps, notre société ? A quels besoins de notre société nos Eglises pourraient-elles répondre ? Quelle forme un sanctuaire de paix pourrait-il prendre en France, en Belgique, en Suisse, dans certaines banlieux, dans certains contextes ? (sgp)

L’observation de la situation socio-politique actuelle de la Colombie - graves conflits à différents niveaux -nous conduit à penser que les églises de tradition anabaptiste ont un rôle à jouer et un message à apporter. Nous aimerions faire des propositions concrètes à partir de notre foi en la bonne nouvelle du salut en Jésus-Christ et prendre clairement position en faveur de la non-violence.

Nos églises cherchent à présenter une alternative chrétienne à la violence, pas en mettant en avant une vie héroïque qui serait réservée à des hommes et des femmes forts, mais plutôt comme une communauté de frères et de soeurs qui rendent témoignage au Seigneur. C’est son l’Esprit qui vit parmi nous et qui se manifeste par la communion fraternelle, le pardon, la réconciliation, la correction fraternelle et une volonté joyeuse de partager les fardeaux les uns des autres. C’est une communauté ou chacun est prêt à donner sa vie pour les autres (1 Jean 3/16).

Notre vision est que les églises deviennent des Sanctuaires de Paix. Pour nous, cela signifie que par Jésus-Christ, nous pourrons arriver à être en paix et que nous-mêmes souhaitons devenir des instruments en mettant au service des autres nos dons et les ministères que nous avons hérités de nos ancêtres dans la foi.

Pourquoi une telle vision ?

Les premiers signes du cycle de la violence et de la guerre que nous connaissons en Colombie commencèrent à apparaître il y a à peu près 50 ans. Bien que les dynamiques de ce conflit aient changé depuis son origine, notre pays retombe continuellement dans le cercle vicieux de la violence. Les conséquences de tous les problèmes engendrés par cette violence se manifestent dans tous les domaines de notre société et aboutissent à l’effondrement des conditions de vie de la population.

Aujourd’hui une partie de la société civile (la population non-armée) participe à différents processus de recherche de la paix et ceux qui travaillent dans ce sens ont progressé. Mais seulement un petit nombre de représentants de l’Eglise mennonite suivent activement ce processus... aussi nous lançons un défi aux assemblées pour qu’elles entreprennent des actions collectives en réponse aux vastes besoins engendrés par la guerre, et qu’elles répandent la paix du Royaume de Dieu.

Nous croyons qu’une proposition collective de l’Eglise mennonite, et d’autres églises anabaptistes, en faveur de la paix est la conséquence d’un engagement sérieux envers notre Seigneur Jésus-Christ.

Notre réflexion porte sur les points suivants :

- L’histoire de la violence: une analyse des expériences spécifiques des assemblées mennonites et anabaptistes qui, dans le passé, ont proposé des conseils, des alternatives et des solutions aux problèmes de la violence.

- Un discernement concernant la réponse à apporter dans des situations difficiles : comment pourrions-nous rendre le message de paix de Jésus concret et réel ?

- Une analyse des expériences où la paix a remplacé la guerre.

Pourquoi est-ce le devoir de l’Eglise d’intervenir dans la situation actuelle ?

Christ envoie l’Eglise, comme le Père l’a envoyé, lui. Nous savons qu’en Jésus la Parole de Dieu a été faite chair et qu’elle “a vécu au milieu de nous” (Jn 1/1-14). En Lui, Dieu révèle sa gloire, et manifeste son amour et sa vérité. En Jésus-Christ, nous nous identifions à la situation réelle du monde et nous souffrons avec l’humanité sans cautionner le péché (Heb 4/15).

Aussi, si Christ a été envoyé par le Père pour pardonner, racheter et réconcilier l’humanité, l’église a le même rôle à jouer parmi les hommes et les femmes. Les enseignements de l’Evangile de Jésus demandent aux hommes et aux femmes de le suivre en menant une vie chrétienne alternative: une communauté de shalom. Ainsi que le dirait John Driver, la façon de vivre quotidienne de la communauté de foi constitue les prémices du Royaume de Dieu, en attendant le jour où il sera réalisé complètement.

Selon la vision anabaptiste, l’Eglise “ne devrait pas être seulement connue de Dieu, mais de tous les êtres humains. L’Eglise devrait être connue pour la repentante, la nouvelle naissance et la façon de vivre différente de ses membres” (Arnold Snyder, Semillas de Anabautismo, crecimiento mundial”, dans Courrier, la publication de la Conférence Mennonite Mondiale). Cet appel à ce que l’Eglise soit comme une ville sur la montagne, signifie qu’elle doit être lumière, un signe et un refuge pour beaucoup, spécialement au milieu des conflits (Matt 5/14, Phil 2/15, Es 49/6).

Qu’est-ce qu’un sanctuaire de paix ?

C’est un peuple.

C’est un peuple qui se rassemble pour prier, pour exercer le discernement, et chercher la volonté de Dieu.

C’est un peuple rempli du Saint-Esprit qui va vers ses frères affectés par les conséquences matérielles et spirituelles de la guerre qui fait rage autour d’eux. Il les accueille et leur rend leur dignité. Ce ministère n’est pas seulement lumière et espérance pour beaucoup de ceux qui vivaient dans les ténèbres, mais c’est aussi un pas en avant vers la réconciliation avec Dieu, avec nous-mêmes et avec notre prochain.

C’est un peuple pour qui la valeur inhérente de chaque personne, ses talents, ses dons, et son ministère sont reconnus afin qu’ils puissent servir Dieu et tous les colombiens. Ainsi il accomplit la mission que Jésus leur a confié de “chercher et sauver ceux qui étaient perdus”.

C’est un peuple qui donne une réalité au shalom biblique. Il travaille à une régénération personnelle, familiale, spirituelle et sociale. Non seulement il réaffirme la dignité et le droit à la vie des membres de notre société, mais il développe aussi un style de relations non-violentes au niveau personnel et au niveau national.

Par ce projet, nous voudrions transmettre un message clair sur la non-violence, le travail pour la paix, la justice, et les droits humains ainsi qu’une recherche de discernement et un appel à la repentante. Nous proposerons une méthode non-violente pour résoudre les conflits et offrirons des formations de prévention de la violence, de résolution et de transformation de conflits. Les sanctuaires de paix seront aussi un lieu de recherche d’alternatives au service militaire obligatoire et un lieu où nous chercherons à améliorer les relations quotidiennes, que ce soit dans la famille, le voisinage, l’église ou le lieu de travail.

Cette proposition de créer des sanctuaires de paix est née de nos réflexions sur l’avenir de notre pays, et sur ce que nous voulons transmettre à nos enfants et petits-enfants. Il nous a semblé qu’il était important de faire face à la réalité de l’impunité, au besoin de pardon et de réconciliation, et de contribuer aux mécanismes de reconstitution du tissu social de notre pays.

Les sanctuaires de paix se situent dans un espace physique défini. Leur existence aura été annoncée publiquement et devra être respectée en tant que sanctuaire et ils ne devront donc pas être violés.

Dans chaque sanctuaire de paix, les adversaires pourront se rencontrer, des forums, des groupes de discussion et toute autre activité en faveur de la justice et de la paix pourront se dérouler, et la communauté séculaire pourra participer et se sentir en sécurité. Ce sera un refuge pour ceux qui sont persécutés à cause de leurs convictions, où directement affectés par la violence ou l’injustice. C’est un lieu protégé par la communauté de foi.

Cet article a été rédigé par Jenny Neme et Pablo Stucky à partir d’ateliers auxquels des pasteurs, des responsables d’église et de jeunes des assemblées mennonites de Colombie ont participé. Jenny Neme et Pablo Stucky sont coordinateurs du projet “travail pour la paix dans les églises et la communauté”, au sein de Justapaz.

MCC Peace Office Newsletter, Juin 2000

Trad : SGP

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Toutes les Eglises sont appelées à être Eglises de paix

New Call to Peacemaking met les Eglises au défi de devenir des Eglises de paix !

Lors de la réunion du 20 mai dernier à Akron (Pennsylvanie), le Comité directeur de “New Call to Peacemaking” a progressé dans l’élaboration d’un nouveau projet appelé “Toutes les Eglises sont des Eglises de Paix ?” (“Every Church a Peace Church ?” : ECPC). Ce projet, issu des églises historiquement pacifistes (mennonites, quakers et Church of the Brethren), a pour objectif de mettre les Eglises au défi de suivre Jésus sur le chemin de la résistance non-violente au mal.

“Le travail pour la paix n’est pas la vocation particulière de quelques dénominations” dit Dale Brown (Church of the Brethren), membre du comité directeur. “La paix ne nous appartient pas, pas plus que l’Eucharistie n’est réservée aux catholiques et le baptême au baptistes. Toutes les Eglises sont appelées à être des Eglises de paix. L’Eglise, qui représente le corps du Christ dans le monde, est une présence qui s’interpose contre les forces d’oppression. Mais elle agit avec la force de la non-violence, comme Jésus l’a fait.”

L’objectif de “Toutes les Eglises sont des Eglises de Paix ?” est de développer des échanges dynamiques entre les chrétiens de différentes dénominations et traditions sur la façon dont Christ appelle les membres de son Eglise à vivre. C’est un défi lancé aux membres d’Eglises historiquement pacifistes à rencontrer d’autres chrétiens, et même la communauté chrétienne dans son ensemble, pour dialoguer d’une manière créatrice et courageuse sur les questions de la violence et de la non-violence, de la guerre et de la paix, du pouvoir et des privilèges... Jésus a demandé: “Ce qui est permis le jour du sabbat, est-ce de faire le bien ou de faire le mal ? de sauver un être vivant ou de le tuer ?” (Marc 3/4). “ECPC” demande “Comment est-ce que votre église répond à cette question ?”

“la puissance de l’amour non-violent est le secret le mieux gardé de l’Eglise” dit John Stoner, coordinateur de New Call to Peacemaking. “Toutes les Eglises sont des Eglises de Paix ?” affirme que quand Jésus a dit ‘heureux les artisans de paix’ il décrivait une caractéristique essentielle de l’Eglise.”

John Jackman, membre du comité directeur, pense que “ECPC” pourrait devenir un mouvement s’étendant à l’Eglise dans le monde entier. “Il est tout-à-fait légitime d’appeler les chrétiens de toutes les dénominations à porter un regard nouveau sur le modèle et les enseignements de Jésus” dit-il. “L’Eglise chrétienne est un peu un géant endormi lorsqu’il s’agit du problème de la violence”.

Si vous voulez recevoir des informations ou de la documentation sur “Toutes les Eglises sont des Eglises de Paix ?”(ECPC), écrivez à <<every [email protected] >> ou à John Stoner à New Call to Peacemaking, PO Box 500, Akron PA 17501, USA,Tel/Fax: +1 717 859 1958,

Email: [email protected]://members.xoom.com/churchpeace/

New Call to Peacemaking a été fondé en 1975 par les églises historiquement pacifistes d’Amérique du Nord pour stimuler leurs assemblées à s’engager davantage sur le chemin du disciplulat non-violent, de la resistance au militarisme et développer des lieux de paix.

Call to Peacemaking, juin 2000

trad sgp

 

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Du pain pour la vie

par Bonnie Klassen

“Le royaume de Dieu ressemble à du levain qui, mélangé à une grande quantité de farine et pétri par une femme, fait lever toute la pâte...”

Je suis dans ma cuisine en train de pétrir du pain, le regard tourné vers la fenêtre. Il y a si peu de pâte... J'espère que le peu de levure trouvée suffira à la faire lever. Tant de personnes ont besoin de ce pain...

Tous les jours, au travail, j'entends leurs histoires, histoires de vie déplacée. Ils arrivent en groupes, les regards levés vers le panneau accroché à l'entrée du bureau, à la recherche justement de ce qu'indique celui-ci: "Justapaz", la justice et la paix.

Dans leur mémoire collective subsiste un temps où l'on n'avait pas à se soucier de ce qu'on allait manger, ni de quoi on serait vêtu. Ils n'avaient pas beaucoup, mais c'était suffisant et ils ne s'inquiétaient pas pour l'avenir de leurs enfants. Aujourd'hui, tout est différent.

Et puis vint le temps où la violence commença à dévorer tout ce qu'ils avaient. Leur lopin de terre était petit mais les agents des multinationales étaient prêts à tout, même à verser le sang, pour les chasser de leurs terres. La vie devint un combat quotidien lorsque les prix de vente de leurs récoltes baissèrent de plus en plus sur le marché. Les acheteurs locaux parlaient de concurrence internationale, de taxes, de tarifs... mais ces explications les laissaient indifférents. Ce qu'ils voyaient, c'était que les pesos dans leur poche n’avaient presque plus de valeur.

Finalement, des hommes armés de fusils arrivèrent. Des groupes paramilitaires. Des guérilleros. Des bataillons de militaires. Tous ces hommes avec leur fusil se ressemblaient, images de mort. S’ils ne quittaient par leurs terres, ils seraient tués. La mort de leurs voisins les convainquit du sérieux de ces menaces.

Ainsi ils durent quitter leurs maisons, l’écho des coups de feu résonnant dans leurs oreilles. Un nouveau pipeline traverserait bientôt leurs terres. Maintenant que le conflit armé a étouffé tout signe de vie et de paix, ils ne pourront plus jamais revenir. On peut espérer que le prix du pétrole augmentera... eux le paient de leur vie.

Je continue à pétrir mon pain, me demandant comment il pourra nourrir autant de personnes, mais je n’ai rien d'autre à offrir. Mélangeant la levure à la farine, je prie pour que cette levure soit encore active, pour qu'elle lève, apportant ainsi l'espoir, montrant l'amour.

Autour de moi, je vois leurs visages. Des personnes déplacées (desplazados) - des gens qui ont fui leur maison pour échapper à la guerre et à la violence économique. Les ressources et l’énergie dont je dispose et que je peux offrir, sont si peu de choses face à tant de besoins. Pendant longtemps, très peu de gens ont apporté leur aide. La peur à empêché les églises de s'identifier aux personnes déplacées et de se tenir à leurs côtés. "Ils doivent être méchants. Ils doivent avoir fait quelque chose de mal. Ce sont sûrement des guérilleros. Sinon pourquoi les aurait-on forcés à quitter leurs terres ? Ils ne disent certainement pas la vérité." Toutes ces excuses ont rendu les Eglises muettes et immobiles. Pas du tout comme la levure.

Seule dans la cuisine, je surveille constamment la pâte. Il semble qu'il ne se passe rien. Il est tellement difficile de garder la foi lorsque les progrès sont si lents.

Et puis, lentement, quelques personnes commencèrent entrevoir la détresse dans laquelle les personnes déplacées étaient plongées, et eurent compassion d’elles. Leurs actions donnèrent aux Eglises le courage de se réveiller et de répondre, multipliant les mains tendues de la solidarité. Des abris s'ouvrirent, des vêtements, de la nourriture et des médicaments furent collectés. Du terrain fut acheté.

Des membres des églises, agissant en disciples de Jésus, se tournèrent vers les victimes de la violence, apportant leur présence physique, psychologique et spirituelle, permettant ainsi aux personnes déplacées de commencer une nouvelle vie. Ces chrétiens étaient peu nombreux, mais au moins, ils avaient commencé à bouger et à agir. D'abord dans une ville... puis dans trois... maintenant dans 17 villes... Lorsque les églises montrent de la compassion, la vision grandit, les ressources se multiplient et l'amour est purifié.

Flor est arrivée à Bogota avec ses trois filles, avec pour tout bagage les vêtements qu'elles portaient. Son mari avait "disparu" deux ans plus tôt. Bien que les paramilitaires ne les aient pas tuées, elles étaient comme mortes. Leur culture était morte, leur communauté était morte, leur dignité était morte, leur avenir était mort.

Elles avaient été forcées de tout quitter, d'abandonner non seulement tout ce qu'elles possédaient, mais aussi leur façon de vivre. La jungle de ciment ne peut pas pourvoir à leurs besoins comme la terre et la forêt tropicale le faisaient. Elles ne saluent plus leurs voisins en leur disant "oncle" et "tante”. Au lieu de cela, leurs voisins regardent leur visage à la peau brune avec mépris, dédain et rejet. Toutes les portes leur sont fermées et le fondement même de leur vie a disparu.

Plusieurs mois plus tard, Flor a reçu de l'argent d'une Eglise pour acheter un petit four de boulanger. Elle a pu à nouveau faire du pain et le vendre comme elle l’avait fait toute sa vie. Ce "pain" reçu s'est multiplié en beaucoup de miches, rapportant ainsi de quoi faire vivre sa famille.

Malgré cette réponse à la prière de Flor, mon esprit n'a pas de répit. Rien ne pourra rendre aux personnes déplacées ce qu'elles ont perdu. Ce que cette Eglise fait ne répond pas à l'exigence de justice. Rien ne peut ôter les cicatrices. L'Eglise n'est pas devenue un sauveur. Mais cette église peut rompre le pain et le partager. Dans cette communion se trouve le miracle de la rédemption et de la réconciliation où l'amour et la vérité se rencontrent et où la justice et la paix s'embrassent (Ps 84,10).

Laissant de côté toutes ces questions, je regarde le visage de Flor. Elle aussi a des questions, mais je vois un changement dans l'expression de son visage. Ses yeux ne sont plus accablés de désespoir. Même si sa famille souffre encore, la vie est redevenue possible. Alors que je la regarde travailler, sourire, c’est le visage de la résurrection que je vois.

Mon pain est de faire la volonté de Celui qui m'a envoyée pour terminer son travail.

Nous, l'Eglise, sommes appelés à être le levain et à cuire le pain de Dieu. Qu'est-ce que la volonté de Dieu ? Elle n’est autre que de consoler ceux qui ont le coeur brisé, proclamer en paroles et en actes la liberté aux captifs qui vivent dans les ténèbres et l'injustice. Nous sommes tous le levain dans le même pain et nous devons nous unir dans une même vision et une même oeuvre. Même s'il y a peu de levain, il faut continuer à le mélanger à la pâte. Nous pouvons croire que tout peut renaître et que le Royaume des Cieux est tout près et grandit.

Bonnie Klassen travaille comme volontaire au bureau "Justapaz" (justice et paix) , de l'église mennonite de Colombie. Lettre de nouvelles du bureau du MCC pour la Paix, avril-juin 2000

Trad : Ruth Wenger Sommer

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NOUVELLES DU RESEAU

Après la Catastrophe...

Un message de Church & Peace à l’église “Vredeskerk” (Enschede), membre de Church & Peace.

Christian Hohmann et Angela Rochner

Au moi de mai, une explosion catastrophique a eu lieu dans la ville d’Enschede proche de la frontière hollandaise. Cette explosion causée par un incendie dans une usine de feux d’artifice située en pleine zone résidentielle a entraîné la mort de 18 personnes et 600 autres ont été blessées. Presque 2000 personnes , dont plusieurs encore à ce jour, se sont retrouvées sans logis. Paul Gentner et Christian Hohmann, Secrétaire Général de Church & Peace, ont tous les deux écrit à l’Eglise “Vredeskerk”, membre de Church & Peace pour lui exprimer leur consternation et leur sympathie.`

Imke Epema, pasteur de cette paroisse d’Enschede, nous écrit le 35 juin 2000 : “Nous avons eu la chance qu’aucun membre de notre paroisse n’ait été blessé ou n’ait perdu un parent. Il y a plusieurs familles ou particuliers qui ont dû quitter leur maison, ce qui les a beaucoup perturbés. Mais, pour finir, tous ont pu rentrer chez eux. En ce moment, je fais un remplacement dans une paroisse voisine de la région sinistrée et j’entends beaucoup d’histoires bien tristes. La vie de nombreuses personnes en restera marquée pendant longtemps”.

Imke Epema nous remercie pour les marques de sympathie à l’occasion de ce terrible événement. Les plaies subies ne guériront pas de sitôt et les images de la catastrophe poursuivront les victimes pendants longtemps. C’est pourquoi les paroisses réformées d’Enschede sont en train de créer un centre d’accueil animé par un pasteur qui aurait pour tache de prendre en charge les suites de la catastrophe, car il y aura beaucoup à faire dans les prochains temps. Un compte spécial a été ouvert pour recevoir des dons à cet effet. Imke Epema remercie pour le don spontané d’un de nos membres. Paul Gentner a proposé d’accueillir dans la communauté de Bannmühle des habitants d’Enschede qui auraient besoin de se reposer et de se ressourcer. Imke Epema a répondu que personne n’en avait manifesté le besoin pour le moment, mais qu’il était bon de savoir que cette possibilité existait.

Trad : Nicole von Rekowski

Réconcilier les communautés divisées

Conférence régionale anglophone

par Stephen Veazey

La conférence régionale anglophone 2000 a eu lieu au Centre Ammerdown lors du week-end de la Pentecôte (9-11 juin); le thème était: “Réconcilier les communautés divisées : une théologie de la paix mise en pratique”. Les personnnes présentes ont pu écouter quelques excellentes interventions de la part des orateurs invités, qui ont une expérience de première main de la vie à Belfast et en Irlande du Nord: le Pasteur Johnston McMaster de l’école d’oecuménisme irlandaise, Tom Hannon de la communauté "Cornerstone" (la pierre de l’angle située à la frontière entre le quartier protestant et le quartier catholique à Belfast) et le Frère David Jardine SSF qui a travaillé comme aumônier dans la prison de Crumlin Road et qui est également engagé dans le ministère de guérison de l’Eglise.

Les orateurs ont abordé le thème de la Réconciliation sous différents aspects. Johnston McMaster l’aborda du point de vue théologique, Tom Hannon du point de vue social, alors que David Jardine mit l’accent sur la repentance, la puissance de la prière et le rôle essentiel du pardon. Les discussions qui ont suivi et l’occasion de rencontrer des personnes placées aux avant-postes en Irlande du Nord ont constitué une partie importante de cette rencontre.

Les membres de Church & Peace furent particulièrement heureux de l’apport de Ellie et Alan Kreider sur “Plaidoyer pour la paix - ce que nous avons appris”. Ellie et Alan sont retournés maintenant aux Etats-Unis et dans ce message d’adieu ils ont survolé plus de trente ans d’engagement dans le mouvement chrétien pour la paix en Grande Bretagne.

Dimanche matin Gerald Drewett et Sylvie Gudin Poupaert ont donné un aperçu de l’histoire et du travail de Church & Peace International, en soulignant son developpement depuis les discussions du début avec les membres des Eglises historiquement pacifistes après la deuxième guerre mondiale, et le travail capital de Wilfried Warneck qui a conduit l’organisation à être régulièrement enregistrée en Allemagne. La théologie de Church & Peace est fondée sur la non-violence de Dieu ce qui donne une unité au-delà de la diversité de toutes les dénominations membres de Church & Peace.

Samedi soir nous avons pris plaisir à une pause culturelle, grâce à nos propres ressources, avec des chants, des lectures et des souvenirs. Le week-end s’est achevé dimanche matin par un culte œcuménique dans la magnifique petite chapelle de la communauté où nous avons prononcé des prières et allumé des bougies pour la justice, la paix et le stabilité dans toutes les régions troublées du monde.

Trad : Louise Nussbaumer

“Pour proposer une parole qui oriente et ouvre un avenir,”

paroles de scientifiques et de théologiens

sur l’homme et son environnement,

sur l’homme et la création”

dans la mouvance de “débat 2000-2000 débats”, lancé par l’ERF, et suite aux réflexions induites par “Justice, paix et sauvegarde de la création” du COE, depuis Bâle 1989

Nos intervenants pour le colloque : Pierre Zettwoog, chercheur et scientifique; le pasteur Jean-Blaise Kenmogne, du Cameroun, président du C.I.P.C.R.E. (Centre International pour la Promotion de la CREation); Frédéric de Coninck, sociologue, chercheur au CNRS; le révérend Peter Harris, pasteur anglican, président de A-Rocha International (association dont le but est de protéger l’environnement dans une perspective chrétienne).

Pierre Zettwoog introduit l’ensemble de manière magistrale. Voici un résumé de son intervention : le débat écologique porte aujourd'hui les inquiétudes de tous les citoyens et des nations du globe. Tous les hommes politiques sont obligés de prendre des dispositions avec cela. Les gouvernements doivent rencontrer les scientifiques. Beaucoup de ces inquiétudes sont fondées. Nous assistons à des modifications climatiques importances, qui entraînent (et entraîneront de plus en plus) des changements dans les possibilités des productions agricoles. Certaines populations ont déjà à supporter les conséquences de ces modifications climatiques, beaucoup de souffrances et de malheur risquent encore d’arriver sans les années à venir. Il existe aussi des risques de modification du niveau de la mer, d’où disparition prévisible de zones côtières et même de pays.

Un des aspects de la crise dans le domaine social est le délire consommatoire : la consommation est devenue une fin en soi. C’est une fuite en avant: il s’agit désormais de consommer toujours plus, sans quoi les sociétés s’effondrent ! Des exemples existent déjà avec les sociétés d’Europe de l’Est, qui n’ont pas pu poursuivre cette course à la consommation, et celles d’Afrique qui n’entrent pas dans la course. L’inquiétude concerne finalement le devenir de l’humanité car les dimensions de la planète sont limitées. On peut maintenant réaliser ce que la science-fiction prévoyait en fonction des possibilités de la génétique, de la robotique et de l’informatique.

Face à ces interrogations graves, que peuvent dire les chrétiens ?

Ces désordres et ces dévoiements du développement de l’occident chrétien sont pour une part les conséquences d’un dévoiement du christianisme. Les remises en question de l’ensemble des habitants de cette planète envers l’occident concernent aussi le christianisme. Les théologiens chrétiens sont bien placés pour savoir ce qu’il y a dans leurs doctrines qui pourrait être réaménagé.

Il est souhaitable que les athées et les croyants participent ensemble à une remise en ordre nécessaire par suite d’une large perte du sens de l’ensemble de de ce qui se vit aujourd’hui. Pour retrouver “le sens”, il est nécessaire de faire une métacritique du développement du monde actuel, qui n’est pas mauvais (le présent n’est pas à condamner !)

Il s’agit de ne pas tomber dans des vues manichéennes car si les choses vont mal, elle pourraient aussi aller bien!... pas de fatalisme non plus (du style: la fin des temps est proche, préparons-nous à l’apocalypse final... sans plus pouvoir rien faire que subir !)

Quel devenir offrirons-nous à nos enfants et arrière petits-enfants ?

Si, dans notre quête de sens , nous nous retournons vers les 2 premiers chapitres de la Genèse, nous voyons qu’une triade initiale est là :

Schéma

Cette transformation de la triade initiale en diades donnent que l’un des termes instrumentalise l’autre et le rend esclave. Il est vital de rendre à Dieu sa place, et ce retour vers la triade nous entraîne aussi à vivre une respectueuse révérence envers la création (Ehrfurcht vor dem Leben).

Un équilibre pourrait ainsi être rétabli. Le salut que nous annonçons contient une dimension écologique qu’il faudrait inclure. Nous avons une bonne nouvelle à annoncer: la création est bonne !

Jean Blaise Kenmogne a ensuite des paroles très fortes à propos de la “théologie écologique et de la lutte contre l’impunité” pour témoigner de son action en Afrique: la culture d’impunité peut être examinée dans le cadre d’une éthique de la création. Le cadre d’analyse au C.I.P.C.R.E. est éco-théologique dans le sens d’une promotion de la création. A partir de plusieurs points: la dépendance, l’incarnation, la limite, la dynamique et la complexité, qui sont les composantes ordinaires de la vie (dans lesquelles nous existons) il est possible de dégager 3 tensions constitutives de la création:

tension 1: dépendance/incarnation

tension 2: limite/dynamique

tension 3:diversité / complexité

et de là, nous avons cette vision globale du réel:

schéma

Sur la tension “limite/ dynamique se greffe l’impunité

sur la tension dépendance/incarnation se greffe l’autocratie arbitraire

sur la tension complexité/diversité se greffent la corruption, le clientélisme et le tribalisme.

Dans la tension “limite/ dynamique, il faut susciter, accompagner et former des acteurs sociaux.

Dans la tension dépendance/incarnation, il s’agit d’engager une réflexion et une recherche théologique ancrées et incarnées dans une pratique concrète.

Dans la tension complexité/diversité, il faut encourager un esprit de solidarité en créant des réseaux et aider au respect de la diversité.

Concrètement, sur le terrain, cela se vit en organisant des colloques, des campagnes (comme la semaine pascale) des “unités JPSC”, des groupes oecuméniques de recherche théologique, en animant une école qui éveille les enfants et les jeunes à la responsabilité personnelle et collective et à la critique constructive, en recyclant des produits et en aidant à l’autonomie des paysans locaux. Un travail de longue haleine, à la fois théorique et pratique !

Nous avons admiré le courage et l’intégrité du pasteur Kenmogne et de tous ceux qui travaillent avec lui. Un chemin d’espérance pour l’Afrique, et dont nous avons à apprendre !

Sur le thème “La notion de vérité dans la science et dans la Bible”, Frédéric de Coninck a eu un regard sociologique sur ces questions, en nous disant “la crise interne du savoir”, “les critiques externes de la science et de la technique”, et le point de vue biblique. Il nous a donné des exemples forts éclairants et intéressants à partir de sa pratique de conseiller dans divers milieux d’entreprise, soulignant l’importance du respect de la prise en compte des différents points de vue sur une même réalité, la vérité étant dans la mise en relation de ces perspectives différentes et dans le dialogue.

Il a aussi analysé nos comportements dans une situation donnée, et nos modes de résolution des problèmes, dégageant 4 attitudes : l’action traditionnelle (on se base sur la tradition pour réfléchir et agir), l’action affective, l’action rationnelle par rapport à certaines valeurs qui sont les nôtres, l’action rationnelle par rapport au but recherché (un mode de fonctionnement plutôt instrumental).

Quand à Peter Harris, il nous a fait cheminer (avec nos pieds!) à travers le parc de Pomeyrol: 11 hectares à redécouvrir avec un nouveau regard !

Il nous donne ensuite quelques indications sur les bases du mouvement A-Rocha, l’esprit dans lequel ils travaillent dans les centres à travers le monde, et leur action concrète : il est important de prendre conscience de l’amour de Dieu pour sa création et de vivre en conséquence la reconnaissance et la repentance, non seulement vis-à-vis de l’espèce humaine mais de toute la création dans laquelle vit l’humanité: “au commencent, Dieu créa ... et Dieu vit que cela était bon”. Comment vivons-nous aujourd’hui, dans tous les domaines, cette parole créatrice ?

Des journées très riches et une réflexion à poursuivre, en nous rappelant que la réflexion et la pratique ne doivent surtout pas être dissociées !

Soeur Christiane de Pomeyrol

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CALENDRIER

SERVICE DE MEDIATION EN EGLISE

Programme pour Decembre 2000 et janvier 2001

Cet hiver, une session de formation à la médiation auralieu à la communauté des diaconesses de Reuilly (Versailles) sous forme de trois rencontres :

Un premier module traitera du conflit - 15 et 16 decembre

Le deuxième de la communication - 12 et 13 janvier 2001

Le troisième de la médiation - 26 et 27 janvier 2001

Pour tout renseignement, écrire à :

SERVICE DE MEDIATION EN EGLISE

5, allée Jean Guihéry

35 000 Rennes

Tel+fax: 02 99 65 44 30

Cycle de formation à la résolution non-violent des conflits

septembre 2000 - juin 2001

Organisé par le M.I.R. romand, le Centre Martin Luther King et Peace Brigades International

Renseignements auprès de Rolf Keller, Schlossstr. 39, CH-3672, Tél: +41 (0)31 771 27 43